• Chapitre 3

    Certains espoirs sont faits pour être déçus. En effet, la capitaine était bel et bien bourrée. Mais vraiment bourrée. Quand on l'a trouvée, elle lisait un magazine cochon en sous-vêtements, en écoutant du death metal et en buvant de la vodka par le nez. Très digne, à 53 ans. On a du lui confisquer l'alcool et cacher la clé du minibar, sous ses hurlements. Et il a fallu attendre qu'elle dégrise. Enfin, "attendre" n'est pas forcément le mot juste. On a jeté l'ancre, histoire de ne pas dériver plus que ce qu'on avait déjà fait, avec l'histoire du chat, et on l'a attachée sur une chaise pour lui balancer des seaux d'eau sans qu'elle puisse répliquer. Ça peut paraître un peu violent, comme méthode, mais c'est absolument nécessaire. Béa est très, très forte.  Quand elle s'énerve, elle peut anéantir toute une armée. Avec une seule main. Et quand elle est bourrée, elle a tendance à s'énerver très facilement. Heureusement, elle n'arrive plus à défaire les nœuds. C'est pour ça qu'on l'attache. Pour notre sécurité.

    Il a fallu tirer à la courte paille celui qui allait jeter la flotte (Pour les petits malins : non, on ne l'a pas mangé après, ohé ohé...hum. Pardon.). C'est tombé sur Roman. Il a vraiment pas de chance, celui-là. Les corvées, ça tombe toujours sur lui. Pourtant, en tant que navigateur et moins musclé de l'équipage (Même moi, je suis devant lui, c'est dire...), il est le moins bien placé pour les faire. Mais évidemment, il est très naïf, donc tout le monde (bon, OK, moi aussi, de temps en temps) en profite pour lui refiler le sale boulot. Faut dire qu'avec son mètre 52, ses grands yeux verts et ses tifs roux qui partent dans tous les sens, on a pas vraiment envie de le prendre au sérieux. On ne dirait pas qu'il a 28 ans ! Il se fait donc un peu bizuter par les bourrin(e)s du bateau, même ceux qui sont plus jeunes que lui (oui, Josh, c'est à toi que je pense). Etant donné qu'il ne s'en rend pas vraiment compte, ce n'est pas bien grave...n'est-ce pas...oulà, je peux sentir vos regards accusateurs à travers vos écrans...revenons à nos moutons (hum hum). Roman a donc pris son courage à deux mains et commencé à remplir les seaux en affrontant le regard de tueuse à gages de la capitaine.

    Le dégrisage actif est un travail long et fastidieux. Il consiste à arroser régulièrement la cible d'eau, au rythme d'un seau toutes les 3 minutes. Au bout d'une demi-heure de traitement, on pose une question simple à la cible (du genre "combien de doigts ?"). Si celle-ci se met à râler, bafouiller, insulter ou ne réagit pas, on recommence. Ça peut durer très longtemps. Selon le nombre de seaux nécessaires,  on peut calculer le nombre de verres bus par la cible. Ici, par exemple, notre capitaine avait bu l'équivalent d'un tonneau d'alcool forts ou d'un baignoire de bière. Deux heures de traitement. Le record est à sept heures et 30 minutes. Et pendant ce temps, le chat était encore enfermé dans la caisse de viande. Nos réserves ont souffert. Nous, on est tenus de rester avec Roman qui balançait et Béa qui vociférait, mais n'avait pas assez de présence d'esprit pour couper la corde avec sa main. Si, si, elle peut, en temps normal. Et c'est là que je suis maintenant, en me disant que j'aurais vraiment dû apporter un bouquin...


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